Le Tour des Fiz, au début, c’était plutôt bien. La bonne forme les semaines précédentes, un dossard chopé in extremis après un passage sur liste d’attente. Un petit coup de fil à l’OT de Passy pour faire récupérer mon dossard par quelqu’un la veille. Sans problème mon bon monsieur.
Et puis samedi soir, A/R express Les Houches/Plaine Joux pour récupérer le sésame n°89. On a pas pu me le récupérer, il y avait un contrôle des sacs à la remise des dossards. Très bien mais fallait le dire avant. La liste de matos obligatoire (la frontale obligatoire pour le petit parcours ayant un départ à 8h du matin, c’est du jamais vu messieurs/dames) militairement remplie est dans le sac à dos le lendemain.
Bref. Réveil 3h du matin, dormi 4 petites heures. Préparation silencieuse et sous les étoiles sur le parking de Plaine-Joux, quelques mots échangés avec l’ami François D’Haene dans l’aire de départ. 5h, c’est parti.
Confiant, je fais les 2 premiers kilomètres en tête puis je prends ma place juste derrière les 10 premiers. Ca va déjà bien vite. Incroyablement vite alors qu’on est partis pour 5 000m de dénivelé. Je suis bien au chaud à la 11ème place jusqu’à Platé (15ème km – 1200D+/500D- env.). Je suis plutôt bien. Et en repartant, patatras. Un étau sur chaque cuisse. Je connais le symptôme, j’ai eu le même pendant 75 bornes à la CCC. Sauf que cette fois-ci, j’ai tout bien fait comme il faut et que je connais un peu mieux le moteur.
La journée sent le calvaire. Je ne peux plus avancer. La remontée jusqu’au Col de la Portette se fait (déjà) au mental et la longue, et pourtant belle, descente vers Salvagny me lasse vraiment. J’arrive au ravito avec une furieuse envie d’abandonner. Malheureusement, mon pedigree (i.e. mes valeurs, et non pas mon niveau pour ceux qui auraient mal compris…) me l’interdit et quand le speaker annonce que le premier n’est passé qu’il y a 30 minutes et que je réalise que je suis occupé à bougonner depuis 5 minutes, je me mets un coup de pied au cul. 30ème km, 23ème, je crois encore à une bonne place.
La suite, c’est le jeu du chat et de la souris avec les crampes. Qui reviennent dès que je m’enflamme un peu. Je fais une belle montée jusqu’à Grenairon (35km). Et là, contrôle des sacs. Génial. Je n’ai pas mon gobelet Quechua Ecolo Tour des Fiz Recyclable Friendly Mountain (mais deux bidons sur mon sac + une poche à eau). C’est noté sur ma fiche, je serai sanctionné…
La descente de 8 bornes sur piste qui suit me savate ce qu’il me restait de cuissots. Il reste 20 bornes et malheureusement je les connais trop bien… Petit Col d’Anterne après une très longue montée. Certains concurrents me doublent en trottinant alors qu’on a déjà 50km et 4.000D+ dans les jambes. Je suis sidéré par l’augmentation du niveau en Trail ces deux dernières années. Et ce niveau, je ne l’ai pas!
Descente sur Alfred Wills. Je m’arrêterai bien faire une sieste mais tant qu’à être là, autant finir.. Ouf, on arrive au lac d’Anterne, magnifique avec le Buet enneigé qui émerge des nuages. Col d’Anterne, il ne reste plus que de la descente. Au refuge de Moëde, il reste 8km, sur piste Jeep comme on m’annonce au ravito. Je serai plutôt en rythme Lada jusqu’à l’arrivée à Plaine Joux, complètement vidé.
Au final, une 29ème place en 10h09. Pas si mal (je pensais 10h, ce qui m’aurait mis 6ème par rapport au classement de l’an dernier!), j’aurais surement pu faire beaucoup mieux sans 51km sur le fil du rasoir. Je suis déçu de ma course, mais ce n’est vraiment pas là l’important.
Ah non, la Cavalerie a encore frappé! Contrôle des sacs à l’arrivée. Vous n’avez pas le gobelet monsieur. Ah bon? Alors je fais mes calculs. Et bien, ça vous fera 30 minutes de pénalité. 10h39, 34ème. Merci. Au revoir.
C’est devenu ça le Trail? Une couverture de survie obligatoire pour faire l’ecotrail de Paris, un contrôle systématique des sacs, des règlements appliqués à la lettre à 150 pauvres âmes qui viennent se faire plaisir? Un gobelet plastique considéré comme élément de sécurité obligatoire?
Un collant qui couvre le genou quand on a déjà un short et des chaussettes de contention (qui a bien pu inventer un jour qu’on attrapait froid par les genoux?
Sanctionner de 30 minutes un type qui finit 4ème de la course parce qu’il a paumé (ou peut être donné à quelqu’un) sa frontale en route? Et comment aurait-il pu courir pendant 1h30 dans le noir?
Notre sacro-sainte sécurité a bon dos messieurs. Une rigueur sur le matos obligatoire, oui. Mais de la souplesse dans les faits, aussi. Tout le monde n’a pas les mêmes besoins pour partir en montagne. Même s’il est vrai que le fait de s’inscrire à une course conduit à en accepter le règlement.
Mais où est passé l’esprit de ce sport? Ce côté aventure? Cette discipline aseptisée conduira certainement à avoir un jour 90% de finishers sur l’UTMB. Sera-ce pour autant une victoire?
En tout cas, il est sur que l’UTMB devrait s’inspirer de courses comme le Tour des Fiz pour repenser sa liste de courses qualificatives. C’est la plus dure que j’aie faite, peut être une des plus dures en France dans le ratio distance/déniv. Une des plus belles aussi. Merci à toute l’équipe organisatrice qui a super bien géré, et aux bénévoles, comme d’habitude aussi souriants qu’indispensables. Je ne suis pas qu’un vulgaire râleur, mais de grâce messieurs/dames, soyez un peu plus souples ou ce que vous chérissez tant disparaîtra.
Tout le monde pourra polémiquer, ce n’est juste pas la façon dont je vois ma discipline, et je pense pas mettre ma vie en danger. L’ultra en course, c’est fini pour cette année, à priori. La suite, on verra.
Stay tuned!
Timoth
(Merci à Jérôme pour les photos)
C'est n'est pas la modestie qui t'étouffe, tu parles de ton "pedigree" ? Crois-tu qu'un record (qui n'en est pas un puisque tu es le premier à réaliser ce parcours en courant) t'ouvriras les portes et mettra les foules à tes pieds ? Est-ce vraiment ça l'esprit trail dont tu parles si bien dans cette article. Prends plutôt l'exemple sur les Jornet, Dawa Sherpa, , Pommeret… qui eux peuvent prétendre à un pedigree !
Du calme et puis d'ailleurs, on se moque de son pedigree! En revanche, si c'est la raison pour laquelle il a terminé et bien, je dis "Bravo"! Il faut savoir chercher des leviers pour se motiver! Peu importe le flacon pourvu qu'on ait l'ivresse!
Quand au niveau du trail, il augmente ou plutôt, on commence à avoir à faire à une vraie élite!
Concernant son record, il s'agit d'un record même s'il est le seul à avoir réaliser ce tour! En revanche, il aura une valeur lorsque d'autres auront décidé de l'attaquer.
Pour en revenir aux sanctions, je les trouve limites enfin surtout pour le gobelet! Pour la lampe, c'est discutable car on ne peut pas savoir s'il l'a vraiment perdue ou donner à un proche! Quand à sanctionner de 30 minutes, il faut juste manquer de discernement!
@ Romain,
Quand j'ai parlé de pedigree, c'était simplement pour dire que c'était contre ma façon de faire et mes valeurs d'abandonner quand je suis pas bien sur une course.
Je dis d'ailleurs plus loin dans l'article que je n'ai pas le niveau des meilleurs…
Le matériel obligatoire est un débat compliqué.
Je comprends absolument qu'on puisse raler sur la liste de matos obligatoire.
1) Demander le gobelet si tu as déjç un poche, c'est idiot.
2) La lampe peu paraître un peu inutile avec un départ de jour.
Mais finalement tu n'as fini qu'à 2h-3h de la nuit, et si tu avais été encore moins en forme, tu aurais sans doute fini dans le noir, bien content d'avoir ta lampe obligatoire.
Laisser du matériel en route, qu'il soit perdu ou donné (on ne peu pas savoir), c'est, pour moi, de la tricherie. C'est simplement du non respect volontaire du réglement.
De même, si le réglement stipule que le gobelet est obligatoire et que le non respect du réglement est sanctionné, il ne faut pas se plaindre de la sanction. Par contre on se plain de l'inutilité du gobelet!
Comme tu sais, je pratique le raid multisport, c'est ma passion est le sport qui me tient le plus à coeur.
En raid il ya toujours du matos obligatoire, et il est souvent plus important qu'en trail. Les sacs sont lourd au départ. Pourtant on respecte le réglement, à la lettre.
Certains se permettent de ne pas faire de même, de ne pas prendre le sac sur certaine section courte par exemple.
Ils trichent.
Ils sont rarement réprimandé ou pénalisé. Je trouve cela dommage.
Mon grand jeu est de suivre à la lettre le règlement tout en essayant d'être le plus à mon aise possible. Ca veux dire prendre une poche à eau vide par exemple. Ou prendre un Kway petite taille. Une demi couverture de survie? pourquoi pas.
L'idée reste: être en régle à tout moment.
@Gat : tu gardes même le sac sur une partie de CO running alors que le point de départ et d'arrivée est au même endroit ?
@all : pourquoi ne pas avoir 2 listes, le matériel obligatoire et le matériel conseillé ? (genre le matos obligatoire pour la survie, et le matos conseillé pour être à l'aise et profiter des ravitos)
@ Gat!
Je crois qu'une liste de matériel obligatoire doit se limiter à ce qui est nécessaire à la sécurité du concurrent! Encore que si cela ne tenait qu'à moi, j'estime être assez responsable pour savoir ce que je dois embarqué! Si je me trompe, je serai le premier concerné.
Ensuite, une pénalité de 30 minutes car on n'a pas sa frontale, c'est cher payé! Si le concurrent l'a donné en chemin, il n'a pas dû gagner 30 minutes avec le poids économisé. S'il l'a perdue, il se paye 30 minutes de pénalité et il a paumé sa lampe. Sans compter, les sacrifices nécessaires lorsqu'on veut jouer les premiers rôles. Sanctionner un athlète de 30 minutes, c'est lui manquer un peu de respect. Mettre 5 minutes de pénalité me semble une sanction raisonnable et plus en accord avec l'avantage qu'il a pu tirer de sa "tricherie"!
@doune, ouais, si c'est pas marqué qu'on a le droit de partir sans, je le garde. En général je demande au briefing histoire de mettre tout le monde d'accord.
@Nico, on est d'accord, 30minutes c'est beaucoup. Mais 5 minutes c'est trop peu, ça donne envie de tricher. c'est ça le problème. Si c'est presque rentable, tout le monde va faire entorse au règlement, c'est pas le but. Une bonne sanction, ça permet de ne même pas réfléchir à une solution de replis.
Par contre, ce que je trouve important c'est que le coût des sanctions soit indiqué à l'avance dans le règlement, et ne soit pas une mauvaise surprise comme pour Tib et son gobelet.
Pour revenir sur la responsabilité, en raid, je ne conseil à personne de partir avec seulement le matériel nécessaire. c'est trop juste.
En trail c'est différent, il est souvent en trop ce matos.
Nous on réfléchi pas, on se plie au règlement, on prends des piles de rechange neuves même si nos frontales sont sur batterie…
Et oui, la sécurité devrait être le seul élément à prendre en compte pour constituer la liste de matériel obligatoire…
Sauf que voilà, 1 gobelet en plastique laissé par mégarde dans la Réserve Naturelle, et pas de trail des Fiz en 2012…
alors on fait quoi?
Et oui, je sais, vous êtes tous des gens responsables …sauf un… et si c'est ce "un" qui a un problème?
Un volontaire pour passer au tribunal à la place du Directeur de Course?
Grand débat…
Bonjour Timothée,
On ne se connait pas vraiment mais si tu te rappelles nous avons couru en début de parcours ensemble jusqu'à une partie de la montée vers le col des Portettes (pour préciser les choses tu t'es retourné à un moment vers moi en me disant que nous étions probablement partis pour courir à 4 => c'est à peu près le moment ou j'ai préféré te laisser partir devant).
Pour répondre à des premiers commentaires postés, je confirme que le mot "pedigree" n'était très probablement pas utilisé dans un sens "prétentieux". Pour t'avoir cotoyé sur qqs kilomètres, j'ai plutôt senti qq'un de modeste et sympathique (nous avons eu qqs mots sur le fait que les premiers étaient partis sur un train d'enfer, et que nous préférions gérer pour ne pas exploser en vol).
J'ai lu ton article et ce qui m'a subjugué, c'est que nous avons fait exactement le même profil de course (si ce n'est que je suis arrivé 20 mins derrière toi).
Je suis parti ni trop lentement pour ne pas avoir de regret, ni trop vite (nous étions à ce moment ensemble), j'ai eu une énorme surprise après le col des Portettes : la sensation de cuisses déjà limitées à ce stade de la course. A la suite, j'ai du également puiser dans mes ressources au niveau psychologique. Je n'avais jamais eu de ma vie comme là le mot "abandon" en tête lors d'une course. Et exactement comme toi, je ne sais pas si il s'agit d'un pedigree ou autre chose, peut etre tout simplement d'amour propre, mais je ne pouvais me résoudre à abandonner.
Et comme toi, je me suis fait doubler sans pouvoir lutter. Je n'ai commencé à redresser la barre qu'après la descente de Grenairon.
Alors je voulais avoir ton sentiment : comment expliques-tu cette baisse de régime si tot dans la course ? Tu as une explication logique ? J'avais mis ça sur le compte d'un entrainement insuffisant (je m'étais blessé à plusieurs reprises en préparation et n'avais pu m'entrainer autant que je voulais). Mais de voir que nous avons fait le même type de course me fait douter. Aurais-tu une autre explication magique ?
JF
PS : en ce qui concerne le règlement, on peut tout à fait comprendre que tu sois frustré par la pénalité qui t'as été appliquée. Surtout de la manière dont tu le présentes (le coup du froid attrapé par les genoux est très drôle !).
Mais sur le principe, à mon avis il est normal qu'un règlement existe et qu'il soit le même pour tous (par ex, la frontale était obligatoire dur le 30 km aussi, ce que je comprends pour que les bénévoles n'aient qu'une liste type à contrôler). Si tu commences à faire plein de cas particuliers, la règle devient trop compliquée et inapplicable. C'est à chacun des participants de réussir à entrer dans les cases pour s'y conformer.
Salut JF,
Désolé, j'ai mis un mois à te répondre..Bouh..
Pour ma part, j'explique ce raté par un manque de sommeil la semaine d'avant : des petites nuits toute la semaine et 3h de sommeil la veille.
Peut être que je ne me suis pas assez couvert au départ aussi et que j'ai gaspillé des calories pour rien. Ou que je suis parti trop vite alors que je suis une vraie buse en termes de vitesse…
Ou que j'avais accumulé trop de fatigue dans les mois précédents.
Le plus plausible est que je me suis bien reposé sur le Vercors, j'ai pas fait grand chose après, et je suis arrivé au départ sur de mon coup. Mais en ultra, ça ne marche pas 🙂
A bientôt
Timothée
Pas de problème ! Mieux vaut tard que jamais comme on dit.
Effectivement, le manque de sommeil, c'est sans pitié pour la course à pied.
De mon côté, je repars sur le trail des Aiguilles Rouges le WE prochain (où j'avais fait 37° l'an passé), en espérant vraiment ne pas "retrouver" mes charmants étaux (tout au moins pas trop vite dans la course, pas aussi vite qu'au tour des Fiz !).
Un aller-retour dans le WE entre Nantes et Chamonix… Ca va être dur dur lundi matin au boulot !!!! 🙂
A bientot
JF
Bonjour Timothée,
De retour des Aiguilles Rouges, j'ai une idée peut être un peu plus précise de cette histoire d'étaux aux cuisses.
Je pense avec un peu plus de recul qu'au tour des Fiz j'étais probablement :
– un peu just physiquement (peut etre en partie du à mes blessures répétées)
– parti trop vite (même si j'avais la sensation inverse)
Aux Aiguilles Rouges, j'ai privilégié le plaisir, et je me suis évertué à l'économie d'énergie.
Résultat : 20° au scratch… CQFD ?….
a+
JF